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À Madagascar, Odile œuvre pour plus d’inclusion face au risque de cyclone | © A. Perrin / HI
Survivante du cyclone Gamane, qui a ravagé le Nord de Madagascar à la fin du mois de mars 2024, Odile plaide pour plus d’inclusion dans la gestion des risques de catastrophes climatiques.
Odile habite un fokontany du district d’Ambilobe, dans le nord de Madagascar. Il y a un peu plus d’un an, la jeune couturière a été victime des ravages du cyclone Gamane et a manqué d’y laisser la vie. Très active au sein de la communauté des personnes handicapées de la ville, Odile a contribué à un projet de réduction des risques d’aléa climatique mis en œuvre par HI. Elle est aujourd’hui convaincue que la sensibilisation et la bonne information sont cruciales pour éviter les catastrophes humanitaires.
Quand on lui demande comment elle va, Odile répond qu’elle se porte bien !
La jeune femme de 36 ans a été amputée, au niveau du genou droit, il y a plusieurs années à cause d’une infection. Odile n’a jamais reçu de prothèse et se déplace depuis l’opération avec deux béquilles, ce qui a considérablement entravé ses capacités pour évacuer sa maison lorsqu’elle en a eu besoin… L’année dernière, à la fin du mois de mars 2024, Odile s’est retrouvée piégée chez elle à cause des inondations provoquées par le cyclone Gamane. Elle raconte que l’eau est montée jusqu’à 1m50 dans sa maison, alors même qu’elle est surélevée de 50cm du sol. L’eau l’a prise par surprise, la jeune femme a été réveillée vers 22h par un voisin qui criait pour prévenir que la rivière sortait de son lit et que l’eau était en train de monter…
« Lorsque j’ai retrouvé un peu mes esprits, je me suis aperçue que l’eau montait déjà par ma porte d’entrée et coulait aussi par ma fenêtre… Je suis parvenue à me dégager et à sortir de chez moi avec mes béquilles mais j’avais déjà de l’eau déjà jusqu’à la taille… J’ai eu très peur », ajoute-t-elle.
Une fois sortie de sa maison, Odile raconte avoir cheminé sans aide comme elle a pu jusqu’au local administratif qui faisait office de site d’hébergement le plus proche. Pour cela, elle a dû traverser un pont, dont une partie s’est effondré plus tard dans la nuit à cause de la puissance des inondations. Elle est arrivée à 23h et a été mise à l’abri pendant 5 jours dans le local le temps que le courant disparaisse.
« En rentrant chez moi, j’ai vite vu que tout était en désordre mais que je n’avais rien perdu ! Malgré le chaos, j’ai pensé à fermer la porte ! » dit-elle en riant.
Ce qu’Odile raconte aussi, c’est qu’elle n’a pas cru aux alertes avant que l’eau n’arrive… Elle qui est pourtant membre d’une association de personnes handicapées, qui a suivi des formations et contribué à des ateliers de préparation à ce type de risque avec HI, n’a pas pris au sérieux les mises en garde qui annonçaient les inondations.
« J’ai été têtue ! Quelques jours avant le cyclone, en voyant que le ciel ne tournait pas, que la pluie et le vent n’étaient pas là, j’ai pensé que le Président de l’association exagérait en nous prévenant de nous mettre à l’abri… On ne m’y reprendra plus ! » précise Odile.
La jeune femme a rejoint cette association en 2023, à son arrivée dans la commune d’Ambilobe. Elle raconte que cela la rendait très heureuse de pouvoir rencontrer d’autres personnes handicapées et d’échanger sur des problématiques communes ! Après le cyclone, Odile est devenue encore plus active au sein de l’association. Elle a contribué à l’élaboration des protocoles en partageant son expérience pour faire remonter les besoins spécifiques qu’elle a identifié, et a notamment insisté sur l’accessibilité des bâtiments publics, comme les centres d’hébergement par exemple.
« J’ai beaucoup apprécié de participer à ce projet et aux ateliers organisés par HI. C’était très important pour moi d’apporter ma pierre à l’édifice, je suis aussi très heureuse d’avoir gagné en compétences sur la gestion des risques de catastrophe climatique. Maintenant, je sais comment agir en amont et mieux réagir lorsqu’un cyclone approche ! » ajoute la jeune femme.
D’après elle, s’il ne fallait retenir qu’une chose, ce serait que la sensibilisation et la préparation sont essentielles pour faire face à une urgence et éviter les catastrophes.
Pour la suite et les prochaines saisons cycloniques, Odile espère que plus de choses soient faites pour elle et ses pairs qui sont handicapés. D’après elle, les ONG et associations s’investissent parfois plus que les autorités, même s’il y a des progrès.
Concrètement, elle aimerait que l’État mette davantage de choses en place pour soutenir les personnes handicapées et faciliter leur intégration économique dans la communauté, en leur accordant un emplacement gratuit sur le marché pour vendre leurs réalisations par exemple. Les moyens économiques sont limités pour les personnes handicapées, et leurs ressources sont très impactées en cas de catastrophe... Odile, par exemple, a perdu sa machine à coudre, rendue inutilisable à cause de l’eau et n’en a pas retrouvé une aussi performante.
« Je veux pouvoir travailler pour contrer le cercle vicieux ! Mon rêve maintenant c’est d’entreprendre et de développer mon activité de couturière ».
Le must pour Odile ? S’offrir une nouvelle machine, plus professionnelle, pour faire des surjets et du point zig-zag.
HI est une organisation de solidarité internationale indépendante et impartiale, qui intervient dans les situations de pauvreté et d’exclusion, de conflits et de catastrophes. Œuvrant aux côtés des personnes handicapées et des populations vulnérables, elle agit et témoigne, pour répondre à leurs besoins essentiels, pour améliorer leurs conditions de vie et promouvoir le respect de leur dignité et de leurs droits fondamentaux.
Là où sévissent les conflits, les catastrophes naturelles, la pauvreté et l’exclusion, nous travaillons aux côtés des personnes handicapées et des populations vulnérables pour améliorer leurs conditions de vie.