Avant la Convention, les personnes handicapées étaient le plus souvent déconsidérées, stigmatisées, certaines d’entre elles placées dans des institutions, la plupart étaient privées de la quasi totalité des droits humains que nous tenons pour acquis: droits politiques, droit à la famille, droit de vote, pouvoir juridique. Elles recevaient une maigre éducation et, le cas échéant, leurs perspectives d’emploi étaient très limitées.
Marianne Schulze
Avant la Convention, disons que les personnes handicapées étaient discriminées, elles n’étaient pas tellement visibles. Il n’y avait pas de journal adapté pour les personnes sourdes, il fallait toujours une personne tierce qui leur explique tout ce qui se passe. Dans le texte qui organisait les concours de recrutement dans la fonction publique, par exemple pour la fonction enseignante, il y avait même un principe discriminatoire. Dans l’organisation de concours, il y avait une mention statuant que « le candidat ne doit souffrir d’aucune infirmité sensorielle ». Du coup, les personnes handicapées visuelles et auditives étaient exclues.
Ayasssou Komivi
Au Mali, la charité était fortement encouragée en tant que composante de la pensée religieuse prédominante; valoriser la pitié pour favoriser l’entraide. Il n’existait pas de loi relative aux personnes handicapées. Celles-ci demandaient l’aumône à la sortie des mosquées, assises à même le sol, en guenilles, pour la plupart des femmes. J’étais choquée et pensais que j’avais le devoir agir pour les sortir de la rue. Avec mon organisation, nous avons bâti un projet pour améliorer l’image des femmes handicapées par le biais de la sensibilisation.
Djikiné Hatouma Gakou (Mali)
Avant la CRPD, les droits humains ne protégeaient pas les personnes handicapées d’un éventuel placement en institution, les descriptions sur la manière d’interner les gens pouvaient même émaner d’organisations internationales. En Europe et aux États-Unis en particulier, pays dits développés, il n’y avait apparemment pas de contradiction entre droits humains et traitements forcés. Les décisions étaient prises au nom des personnes sur la base du prétendu “intérêt supérieur”. Ce principe a été si largement défendu que combattre les conceptions des professionnels et des Etats à ce sujet demeure un grand défi.
Jolijn Santegoeds
En Amérique latine, ce que je connais le mieux, l’approche fondée sur le droit était encore très limitée. […] Les programmes gouvernementaux ou ceux des O.N.G. avaient une forte orientation médicale, fondée sur la rééducation, la kinésithérapie, l’éducation spécialisée et les services séparés. Dans les années 90 et au début des années 2000, peu d’efforts étaient faits en direction d’une approche fondée sur le droit dans la région.
Silvia Quan
Avant la Convention, Handicap International agissait sur la réadaptation, la sensibilisation, les moyens de subsistance, mais nombre de questions liées aux principes de vie autonome, d’inclusion, en lien avec une approche fondée sur le droit ou sur l’égalité des droits, étaient étrangères à l’approche franco-française. Pourtant, les règles universelles des Nations Unies existaient, mais elles restaient un texte assez technique.
Alexandre Cote
Avant la ratification de la Convention, les engagements de la constitution et de la loi n° 97034 n’avaient pas de valeur contraignante. Les acteurs du secteur privé, et surtout l’administration publique n’étaient pas obligées de les mettre en œuvre. Il n’y avait donc pas de cadre constitutionnel et juridique concret qui prenne en compte les questions du handicap à Madagascar. Par conséquent, les personnes ne pouvaient pas jouir de leurs droits au même titre que les autres citoyens. Ce d’autant plus que la tradition malgache a parfois tendance à stigmatiser les personnes handicapées. Et à les exclure du système social et économique De plus, très peu d’acteurs et d’organisations de personnes handicapés, connaissaient vraiment les droits des personnes handicapées.
Hugues Rakoto Ramambason
Avant la Convention, il était difficile de s’intéresser d’avantage à la situation des personnes handicapées, par manque d’accès aux services. On ne disposait pas de véritables statistiques de comparaison. Les Règles Universelles n’avaient pas valeur d’obligation et le handicap en tant que thématique était encore moins visible. Dans de nombreux pays, le mouvement a été de faible envergure. Les organisations parties prenantes au mouvement des personnes handicapées ne comprenaient pas le langage des droits de la personne. Et pourtant, s’il n’y a pas de pression venant de la société civile, les choses ne se font pas.
Sanna Laitamo
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