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Au Bénin, le parcours de Raphaël pour apprendre à marcher

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Inclusion | Réadaptation | Benin | PUBLIÉ LE 4 mars 2025
Portait en gros plan d'un garçon assis dans une salle de classe et qui tient une ardoise à la main. Il a le visage tourné de trois-quarts et sourit. Autour de lui, on devine le visage et les bras d'autres enfants.

Raphaël, 10 ans, est en classe de CE2 à l’école primaire publique à Cotonou au Bénin. | © Solva - B. Akpo / HI

Raphaël est né avec une paralysie partielle. Pendant longtemps il n’a pas pu marcher. Aujourd’hui, il court et se rend seul à l’école, où il étudie dans l’espoir de devenir médecin.

Un jeune garçon rentre chez lui dans la lumière dorée d’une fin d’après-midi. C’est la sortie des classes ; la scène, universelle, se déroule à Cotonou au Bénin. Ce garçon, c’est Raphaël, et le chemin qu’il parcourt aujourd’hui en une quinzaine de minutes pourrait vous paraître anecdotique. Pourtant, pour lui, c’est la récompense d’années d’efforts, de courage et de détermination. Car Raphaël a dix ans et depuis sa naissance, il a une hémiplégie partielle au côté gauche.

Le courage d’une mère

Pour Rosine Moulero, sa maman, la vie n’a pas toujours été facile. Le père de Raphaël était violent et après la naissance du garçon, il est parti en laissant ses quatre enfants à la seule charge de leur mère. Rosine n’a jamais reçu d’aide financière ; pour s’en sortir, elle achetait des marchandises à crédit et les revendait. « La famille ne m’aidait plus et c’était très difficile, explique-t-elle. Parfois j’avais du mal à donner un vrai repas à mes enfants. Il m’arrivait de ne pas manger pour leur laisser le peu qu’on avait. »

Rosine a elle-même une déficience : elle a perdu l’usage de ses mains, ses doigts sont recroquevillés et elle ne peut pas les bouger. Un jour, alors qu’elle n’était qu’une enfant, elle a été punie par sa mère qui s’est emparée d’elle et lui a plongé les mains dans l’eau bouillante. Les conséquences de cette violence sont incommensurables dans la vie de Rosine, qui en souffre encore aujourd’hui.

Un suivi personnalisé à domicile

À 6 ans, Raphaël ne savait pas encore marcher, c’est sa maman qui l’emmenait à l’école et allait le chercher. Constatant ses difficultés, le directeur de l’école a référé le garçon au Guichet Unique de Protection Sociale (GUPS), une structure déconcentrée du ministère des Affaires Sociales et de la Microfinance qui abrite un espace contact de réadaptation à base communautaire (RBC), porte d’entrée des différents services sociaux proposés par l’État béninois. Depuis lors, Sabine Agbo, responsable technique de l’espace contact RBC, assure le suivi du garçon et de sa famille : elle leur rend régulièrement visite, identifie avec eux leurs besoins et suit les progrès de Raphaël.

« Beaucoup de personnes handicapées méritent d’être accompagnées et soutenues », explique Sabine Agbo. « Mon travail c’est de les écouter, d’identifier leurs besoins et de trouver avec elles un moyen d’y répondre. Nous accompagnons une personne jusqu’à son autonomisation. Raphaël par exemple a bénéficié de soins médicaux et d’un kit scolaire, comprenant entre autres un sac, des cahiers, des crayons et des stylos. »

En 2023, Sabine, enregistre et recommande Raphaël à HI et le garçon intègre le projet d’éducation inclusive de l’organisation. La priorité est d’abord d’améliorer son état de santé général et de l’aider à être plus autonome. Le garçon réalise donc des consultations médicales où on lui prescrit des analyses, des soins et des médicaments. Il suit ensuite quinze séances de rééducation fonctionnelle.

Le directeur de l’école, qui a suivi son évolution, témoigne : « J’ai constaté de réelles améliorations : avant, Raphaël ne pouvait pas marcher alors qu’aujourd’hui, il vient tout seul à l’école. Le changement est spectaculaire ! »

Aujourd’hui, Raphaël peut se lever, aller tout seul aux toilettes, il sait monter sur une moto et marche aisément, même s’il a parfois encore mal aux pieds. Il adore courir : quand il rentre à la maison le soir, entre ses devoirs et les tâches ménagères qu’il effectue, il s’éclipse dès qu’il le peut pour jouer au ballon avec ses amis. Rosine, ravie par les progrès de son fils, est très reconnaissante envers Sabine Agbo et son soutien sans faille.

Grâce à cet accompagnement, Rosine a reçu une aide en 2021 pour acheter quelques articles lui permettant de lancer un petit fonds de commerce. Elle a installé un stand dans la rue et vend différents produits tel que du café, du savon, du pétrole ou des friandises. Elle rêve de pouvoir agrandir sa boutique afin de mettre ses enfants à l’abri du besoin. « Je veux prendre soin de mes enfants, ils sont ce que j’ai de plus précieux, explique-t-elle. Je prie Dieu de les voir grandir et de leur donner un bel l’avenir. »

Une école pour tous et toutes

Raphaël est en CE2 à l’école primaire publique Zogbo A qui accueille environ 1 500 enfants, âgés entre 6 et 15 ans. Parmi eux, près d’une quarantaine d’élèves vivent avec un handicap. Pour leur offrir les meilleures conditions d’étude, tous les enseignants sont formés aux pratiques éducatives et pédagogiques inclusives. Ils acquièrent ainsi des clés pour adapter leur enseignement aux différents besoins des enfants. Des latrines accessibles, dotées d’une rampe, ont aussi été construites avec l’aide de HI pour permettre à tous les enfants d’évoluer dans un environnement adapté et confortable.

Pour aller toujours plus loin dans l’inclusion, l’établissement a mis en place en 2023 un nouvel organe, le gouvernement scolaires. Il s’agit d’un noyau de sept écoliers, élus par leurs pairs, qui s’engagent comme ambassadeurs de l’inclusion et s’impliquent activement dans la résolution des problèmes de leur école. Tout au long de l’année, ils mènent des actions de sensibilisation pour promouvoir leurs droits, former leurs pairs au droit et au handicap. Ensemble, ils sont garants d’une organisation qui répond aux besoins des élèves, surtout les plus vulnérables, et leur donne les mêmes chances d’apprentissage et de développement qu’aux autres enfants.

Raphaël adore aller à l’école. « Ma matière préférée, ce sont les mathématiques. Le maître est très gentil ; il vient me voir en classe et me dit quoi faire. Plus tard, je voudrais être docteur, pour pouvoir soigner les gens… et les piquer », rajoute-t-il en riant.


Le projet d’éducation inclusive et formation professionnelle, deuxième phase de CPP2 au Bénin, lancé en 2022 et qui se prolonge jusqu’à fin 2025, permettra d’accompagner 500 enfants handicapés en scolarisation et 150 jeunes en formation professionnelle. Un accompagnement personnalisé est proposé à chaque enfant en fonction de ses besoins et de ses projets, avec des aides pour bénéficier de soins médicaux (médicaments, analyses), d’aides techniques (prothèses, orthèses, etc.) et de suivre un apprentissage sur-mesure. HI accompagne aussi la formation des professeurs et des maîtres d’apprentissage aux techniques de pédagogie inclusive.

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